Pourquoi éduquer vers un développement durable? Et comment?

1 mai 2003

Dans son activité à la Fondation Education et Développement, Myriam Bouverat s’engage au quotidien pour une « éducation vers un développement durable ». Pour elle, il n’y a pas une manière de faire du développement durable mais un ensemble d’actions qui tendent « vers ».

Qu’entendez-vous, en quelques mots, par Education au développement durable?

bouveratEduquer à la recherche d’un équilibre – acceptable par chacun – entre les aspects sociaux, environnementaux et économiques du monde. L’important est de comprendre le fonctionnement du monde, notre rapport au monde pour avoir envie de rétablir certains équilibres. L’éducation devrait apprendre à être critique et à développer la compétence à réagir à des situations ressenties comme injustes, insoutenables. Mais le concept de développement durable est flou et complexe, je préfère alors utiliser l’expression « Education vers un développement durable » qui montre une direction et non la fin. Comme une fonction mathématique composée de facteurs économiques, sociaux et environnementaux qui « tendrait vers ».

« L’Education vers un Développement durable », certains disent que cela n’existe pas encore si ce n’est dans la tête des grands penseurs, que leur répondez-vous?

Dans le quotidien scolaire, il n’ y a effectivement aucune discipline appelée développement durable, et heureusement ! Il s’agit d’un concept transdisciplinaire, voire d’un concept recouvrant l’ensemble des disciplines, champs ou domaines des compétences.

Mais dans la réalité, on constate que l’Education vers un développement durable est liée ou confondue avec l’éducation à la citoyenneté, à l’environnement, à la santé, l’éducation dans une perspective globale, et j’en passe… Autant d’éducations qui se réfèrent à une même approche mais qui disent avoir leur spécificité. Personnellement, j’ai souvent de la peine à apercevoir les limites de ces spécificités car toutes se réclament d’une approche systémique des « problèmes », se fondent sur les mêmes valeurs, utilisent les mêmes concepts, travaillent sur les principes de l’interdisciplinarité (encore un terme qu’il s’agirait de définir clairement !) et tentent de fonctionner en réseau.

Quels sont alors les fondements d’une éducation vers un développement durable ?

Il s’agit d’une approche qui tient compte à la fois de la dimension personnelle et sociale de l’être humain, privilégie la notion de citoyen responsable, préconise une culture de paix, analyse les interdépendances mondiales, lie l’homme à son environnement, respecte les droits humains, prend en compte la multiculturalité, …

Quant aux valeurs et concepts sous-jacents (liberté, justice, culture, interdépendance, respect, bien-être, environnement,…), ils n’appartiennent à personne. Ils sont dynamiques, évolutifs. Il faut les utiliser pour tenter de faire passer nos idées, les faire évoluer, sans chercher à se les approprier.

Et qu’est-ce que cela implique ?

Cela implique, par exemple, de donner des outils aux jeunes pour leur permettre de comprendre le monde dans lequel ils vivent et dont ils sont les citoyens. Et d’analyser ses fonctionnements : justes/ injustes ; qui excluent / qui intègrent ; qui respectent / ne respectent pas l’environnement dans le sens large…

Cela nécessite aussi de faire intervenir des valeurs personnelles, ou plus largement reconnues, pour se situer (en tant qu’individu, en tant que citoyen) par rapport à ces fonctionnements. Ce n’est qu’à la condition où l’individu est capable de se situer dans le monde qui l’entoure qu’il aura les moyens d’y prendre part. Et donc, en fin de compte, de jouer son rôle de citoyen.

Mais concrètement, comment faire?

C’est effectivement une question que l’on me pose sans cesse et à laquelle je n’ai pas de réponse toute faite. Souvent, je dis « mais ce que vous faites va vers un développement durable », mais ce n’est pas suffisant. Les enseignants ont besoin d’un cadre, d’activités identifiées pour se représenter le nouveau concept à la mode. C’est dans cette idée, qu’en Suisse, nous avons commencé par recenser dans un petit recueil une vingtaine d’expériences et de projets d’école qui montrent qu’il n’y a pas  » une manière de faire du développement durable » mais un ensemble d’actions qui tendent vers.

Ne serait-ce pas encore un fardeau de plus sur les épaules des profs, après les Socles de compétences et tout le reste ?

Non, bien au contraire. Les socles de compétences obligent à considérer les apprentissages et l’école d’une manière moins traditionnelle et plus humaniste. Les compétences proposées dans le domaine « Eveil » vont exactement dans le sens d’un développement durable. Une compétence telle que « se poser des questions » n’est-elle pas le point de départ du changement ? Quant à « tout le reste » ne peut-on pas le considérer comme une ouverture plutôt qu’une charge ?

En savoir plus :

« Vers le développement durable. 20 activités et projets d’établissement de Suisse. Editions Loisir et Pédagogie, 2001. Commande Fondation Education et Développement, Av. de Cour 1, CH-1007 Lausanne. www.globaleducation.ch

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