Et comment ça se passe au Nord ?
Au Nord, la société civile travaille énormément pour faire connaître les problèmes liés à l’OMC. Les gens écouteront s’ils comprennent que l’OMC a aussi un impact sur leur vie. L’OMC n’est pas purement un problème du Sud ! La dérégulation des services par exemple peut avoir aussi une influence sur l’accès à l’eau, sur la qualité de l’enseignement, sur le secteur culturel…
Est-ce que l’OMC n’est pas très éloignée de nos réalités ?
Les résolutions de l’OMC sont prises par des représentants des Etats. Les représentants de nos pays se trouvent à la base de la politique de l’OMC. Les citoyens doivent donc exiger qu’ils justifient leur politique. Car au nom de qui parlent-ils en réalité ? Le ministre britannique du Commerce et de l’Industrie, Alan Johnson, a dit dernièrement qu’imposer la libéralisation n’est pas profitable aux pays en voie de développement. Le jour suivant, le commissaire européen au Commerce, Peter Mandelson, un britannique, a présenté un document à l’OMC qui insiste sur une libéralisation drastique des pays en voie de développement ! La question est alors à qui Mandelson doit-il rendre des comptes pour sa politique ? L’opinion de qui exprime-t-il ? Certainement pas celle du ministre britannique !
L’OMC n’est-elle pas trop complexe à suivre?
L’invraisemblable complexité des règles de l’OMC, produites par des technocrates, fait en sorte qu’il est presque impossible de suivre ce qui se passe dans cette organisation. Egalement pour nos représentants politiques. Mais je ne crois pas que ça justifie qu’ils ne prennent pas leurs responsabilités. Ces textes sont finalement une traduction technique d’une politique. Et ces choix politiques sont faits par les politiciens. Voila. Voulons-nous véritablement une politique qui mène au dumping massif dans les pays en voie de développement ? Si ce n’est pas le cas, alors il faut changer de politique…
Peut-on encore faire marche arrière ?
Les parlements signent les accords de l’OMC sans bien saisir leur contenu. Et une fois signés, ils sont coincés. Les citoyens doivent donc suivre cela de près. Alors que maintenant, nous laissons faire nos représentants, pensants que la libéralisation est toujours positive. Mais il n’est jamais trop tard pour réagir. Au niveau de l’Accord général sur le commerce des services (AGCS) (Voir AGCS dans glossaire), il est prévu que plus aucune libéralisation ne puisse avoir lieu tant qu’aucune recherche n’aura été menée sur l’impact de la libéralisation des services et sur la manière dont cela promeut le développement. Cette recherche n’a pas encore été réalisée et pourtant, on avance dans l’AGCS. Ce qui est contraire à ce que l’accord prévoit. Donc illégalement. Mais là, ça ne dérange pas. C’est de nouveau un exemple du déséquilibre à l’OMC. Certaines règles de l’OMC comptent, d’autres pas… Pour cette raison, nous devons inciter nos autorités à jouer le rôle qu’ils doivent jouer : suivre ce qui s’y passe.
Comment les pays en développement peuvent-ils se défendre ?
Ils doivent formuler leurs propres avis et passer des alliances pour se renforcer. Cela arrive de plus en plus souvent. Mais nos avis sont ignorés ! Cela est rendu possible parce que le processus de décision est fondamentalement antidémocratique. Il arrive que la majorité des pays votent « A », mais le président note résolument « B », la réponse des puissants pays riches, même si ceux-ci étaient minoritaires. De plus, il y a en permanence des réunions, petites et fermées, où seuls sont invités un petit nombre de pays. Leurs conclusions sont présentées plus tard comme des décisions communes… Nous ne disposons pas d’espace pour négocier de façon égale. Le respect des principes démocratiques est une première exigence pour la réussite de l’OMC. C’est inimaginable cette manière qu’ont les grandes puissance de travailler. Les EU ont été condamnés par l’OMC pour leurs subventions illégales au coton qui font dégringoler les marchés locaux dans le Sud. Mais en finissent-ils avec les subventions pour autant? Non, ils essayent de changer les lois de l’OMC, pour que leurs subventions deviennent légales…