Ouverture et autonomie. Ce sont les deux mots clés de la formation d’adultes proposée par Education Environnement. Au programme : « Des activités actives et interactives vécues dans et autour du parc urbain, départ d’une réflexion… » Immersion.
Un homme courbé caresse une poubelle. À quelques mètres de lui, une femme, jeune, accroupie. Elle pelote tendrement le tronc d’un arbre centenaire. Tous deux portent sur le revers de leur veste un sigle étrange, une sorte de badge arborant un entremêlement douteux de capsule de bière et de feuilles en tous genres. Leurs yeux sont bandés. Ils se redressent, puis tâtonnent sur le chemin du Parc du Jardin botanique, chacun dirigé par un « guide initiatique ». Nous sommes à Liège, à deux pas de la gare des Guillemin. Loin d’une nouvelle pratique ésotérique, ce sont les premiers pas de la formation « Le parc urbain: terrain d’animation et de socialisation », organisée durant deux jours par l’asbl Education Environnement.
Regroupés sous un grand Aulne, les participants prennent un premier temps de recul pédagogique avec les formateurs, Jacques Roskam et Françoise Loret. « Composer son propre badge de présentation avec les éléments glanés dans le parc – avant d’expliquer son choix au groupe – permet de sortir de l’oralité pour bouger, être créatif, et marquer davantage les esprits… Cela favorise la cohésion de groupe. Par ailleurs, ce n’est pas seulement une prise de contact entre les participants, c’est aussi un premier contact avec le parc ». Ce premier contact s’approfondira tout au long de la matinée. La chronologie des activités proposées allant crescendo dans la découverte du Parc et dans la cohésion du groupe, incitant les participants à progressivement se reconnaître, se connaître puis se faire confiance.
Une palette d’activités étonnantes
Ainsi, après l’épisode « badge », les animateurs, professeur d’école normale, guides, femme au foyer… placent un miroir sur leur nez et se baladent en file indienne. « Activité collective pour voir les choses autrement ». Animation suivante : les yeux bandés, guidés par un partenaire, ils touchent divers éléments du Parc, qu’ils devront ensuite retrouver une fois revenus à leur point de départ. « Expérience pour faire confiance, éveiller les sens et favoriser une autre approche de l’arbre (chaque arbre est unique) ou des matières ». Ensuite, chaque participant parcourt l’espace au travers d’une longue vue tout en expliquant son cheminement à un partenaire. « Animation pour développer la complicité, observer les détails et affiner son expression ». Puis ils devront choisir un objet symbolique pour le mimer, raconter l’histoire imaginaire d’un arbre, dessiner la journée d’un banc, interviewer un vieil homme qui vient là pour que son chien Charly fasse des rencontres… fuir enfin le gel pour, à l’intérieur, malaxer la glaise, déchirer les feuilles et briser les brindilles qui composeront les maquettes du Parc.
« Dans toutes ces bribes d’animations, les dispositifs ne sont pas gratuits, il y a une chronologie de l’individuel au collectif, avec sans cesse des phases de négociation, explique Jacques Roskam. Beaucoup d’activités nécessitent de faire des choix qui ne seront pas jugés. Pédagogiquement, le message et la finalité sont de favoriser l’autonomie de l’individu et du groupe« .
Ouverture aux idées et aux pratiques
L’après-midi de la première journée laisse place ensuite à un débat animé avec différents acteurs du parc : riveraines, agents de prévention, éco-conseiller, président du Comité des Serres… Cela participe à l’ouverture, autre mot-clé de la formation. »L’ouverture que nous suscitons, explique Françoise Loret, c’est se rendre compte que nos idées ne sont pas partagées par tous, mais aussi s’ouvrir à de nouvelles façons d’aborder les choses. Nous ne proposons pas ici un savoir cognitif traditionnel – tout le monde à accès aux noms des arbres – mais un travail davantage sur le sensoriel, la créativité, l’expression, l’imaginaire… »
Autonomie et socialisation
Ainsi, la seconde journée de formation est consacrée à construire ensemble des activités dans le parc, allant vers l’ouverture et la socialisation, caractéristiques essentielles d’un parc urbain. Les participants sont regroupés par public cible. « Moi, avec mes ados, je verrais bien un projet d’une année dans le parc urbain de Schaerbeek…« . Les pistes se dessinent à la volée : se choisir un endroit secret puis le faire visiter aux autres, utiliser un appareil numérique pour suivre l’évolution du lieu, réfléchir à l’éco-civisme suite à sa dégradation, s’appuyer sur les éléments végétaux et minéraux, etc. « L’un de nos objectifs est de donner la capacité aux participants de créer leurs propres animations, adaptées à leur public et à leur contexte« , précisent les formateurs.
Si vous passez par Schaerbeek prochainement, ne vous étonnez donc pas de voir un jeune, courbé, caressant une poubelle, et une fille, accroupie, les yeux bandés, pelotant tendrement le tronc d’un arbre centenaire…
Christophe Dubois,
Article publié dans la revue Symbioses, n°69