Inciter sa commune à adopter des comportements économiquement, socialement et écologiquement durables, tout en respectant la participation des acteurs locaux, c’est possible. L’exemple avec « Ça passe par ma commune », une campagne réunissant le tissu associatif local afin de donner l’impulsion aux politiques d’agir concrètement pour un développement durable et équitable.
Il suffit parfois d’un coup de pouce pour que les élus voient comme une évidence l’intégration du développement durable dans le fonctionnement de leur commune. À l’initiative d’un collectif d’associations (1), la campagne « Ça passe par ma commune » agit dans cette optique. Des associations locales, avec l’aide des partenaires de la campagne, interpellent les politiques sur des questions bien spécifiques touchant au développement durable et équitable. Une manière de peser dans les décisions de sa commune au travers des engagements des décideurs.
Pour accompagner les associations locales dans leurs démarches d’interpellation, des cahiers autour de sept thèmes d’action ainsi que des documents méthodologiques (plan d’action, lettres d’interpellation, etc.) ont été mis à leur disposition. Des animateurs locaux, au sein de chaque province, apportent également une aide logistique aux associations, par exemple, pour trouver la salle où se déroulera la rencontre avec les politiques.
Les 7 thèmes d’action de « Ça passe par ma commune », autour desquelles s’articulent les propositions faites aux communes :
- Choisir une consommation équitable ou éthique
- Choisir une consommation bio ou écologique
- Soutenir une économie sociale et solidaire
- Développer une coopération Nord-Sud
- Respecter un environnement local
- S’engager pour la planète
- Favoriser une démocratie locale participative
Poursuivre les engagements
Depuis le lancement de la campagne début 2006, 42 communes francophones (sur les plus de 270 que compte la Belgique…), petites ou grandes, furent le théâtre d’interpellations. Les propositions et engagements concrets pris lors de ces rencontres par les candidats aux élections communales 2006 ont été enregistrés par les associations locales. Le but étant que ces promesses ne soient pas jetées aux oubliettes une fois le scrutin terminé.
La suite de la campagne consiste maintenant en un suivi des engagements pris. « Les associations locales tentent de s’assurer que les promesses préélectorales sont bien prises en considération dans les accords de majorité », explique Jérôme Chaplier d’Oxfam-Magasins du monde. « Mais nous voulons surtout que les communes poursuivent leurs engagements durant toute la durée de la mandature. Les associations veulent pour cela se poser en interlocuteurs des élus locaux, et accompagner leurs démarches de manière constructive ». Ainsi, une évaluation régulière des réalisations des communes sera mise en place, et des outils seront proposés tant aux associations qu’aux élus.
Le succès de la campagne reste variable, certaines plates-formes locales ne comptant que quelques acteurs. Libre à toute association de prendre le train en marche ou de développer une plate-forme au sein d’une commune où l’initiative « Ça passe par ma commune » n’a pas encore vu le jour.
Agir ensemble
La commune de Jette fait figure d’exemple dans le paysage « Ça passe par ma commune ». Une vingtaine d’associations se sont réunies pour prendre part à la campagne. Bénévole pour Oxfam-Magasins du Monde, Willy Vanhamme fait partie du noyau actif de cette initiative. Il consacre pas mal d’énergie à l’organisation des nombreux événements lancés par la toute jeune plate-forme. « Depuis que la plate-forme s’est créée, il y a des liens, des réseaux entre associations qui se sont mis en place. Avant, chacun travaillait de son côté. Aujourd’hui, on se connaît et on est devenu un mouvement important au sein de la commune. On représente la société civile. La commune tient compte de nous de manière moins dispersée qu’avant. »
Avant les élections, la plate-forme avait fait parvenir aux différentes formations une liste de 20 propositions. Aux candidats de cocher les 10 propositions qui leur semblaient prioritaires. Tous se sont ensuite réunis autour d’un petit-déjeuner équitable pour en discuter. Les engagements de chacun furent soigneusement posés sur papier. « Après avoir laissé coulé un peu d’eau sous les ponts, on leur a fait parvenir une lettre rappelant leurs engagements en soulignant qu’on espérait qu’ils en tiennent compte dans leur programme ».
Une nouvelle vient ensuite accélérer le processus : la Région de Bruxelles-Capitale accorde à Jette un contrat de quartier visant à redynamiser la commune. Une aubaine pour la plate-forme. « On s’est vite rendu compte que ce contrat impliquait les notions de développement durable et de participation. » La future majorité s’étant engagée à œuvrer pour un développement durable, certaines propositions pouvaient prendre forme, sous l’œil avisé des associations locales. Le contrat de quartier prévoit, par exemple, la mise en place d’un conseiller en développement durable.
« Nos actions ne visent pas à ce qu’il y ait moins de politique, au contraire. Mais on veut que la politique soit responsable, pour donner du sens et de l’espoir aux gens. Aujourd’hui, la confiance se perd. » Conscient qu’il n’est pas toujours évident de mobiliser les habitants, Willy Vanhamme rajoute : « C’est aux politiques de montrer la voix. L’enjeu est de recréer une proximité entre le politique et la population. » Le thème de la démocratie participative figure d’ailleurs au calendrier des prochains événements organisés par la plate-forme locale.
Les financements octroyés dans le cadre du contrat de quartier à Jette agissent comme un facteur déterminant à la mise en place de politiques de développement durable. Toutes les communes ne jouissent pas d’une telle opportunité. Ceci dit, l’action des associations a eu le mérite de sensibiliser les élus et de prémâcher le travail.
Céline Teret
(1) Credal, Max Havelaar, le Réseau Eco-consommation, Nature et Progrès, Oxfam-Magasins du monde, Inter-Environnement Wallonie, la Campagne Vêtements Propres, le CNCD/11.11.11, le Réseau Financement Alternatif, SAW-B
Site de la campagne « Ça passe par ma commune »