Effervescence d’informations, émergence d’idées. Bienvenue à la formation « Comment sensibiliser au développement durable : outils et techniques d’animations ». Immersion dans de multiples recoins pédagogiques.
Ça découvre, ça cogite, ça échange, ça questionne, ça réfute parfois aussi… « Le développement durable sous cet angle-là, je n’y avais pas songé… », « Comment adapter cette animation avec mes élèves ? », « Exploiter cet outil dans le cadre d’une de mes animations, pourquoi pas ? »… Un flot de réflexions envahit ceux qui ont répondu à l’appel de la formation « Comment sensibiliser au développement durable : outils et techniques d’animations ». Subtilement orchestrée par le Centre Régional d’Initiation à l’Environnement (CRIE) de Liège et l’Institut d’Eco-Pédagogie (IEP), cette formation plonge ses participants au cœur du développement durable dans toute sa complexité.
Place aux acteurs
Réunis en résidentiel à Liège, les participants proviennent d’horizons épars. Certains sont animateurs ou enseignants, d’autres travaillent dans le social, le développement, l’environnement. Quelques-uns sont actifs dans le milieu de l’entreprise. D’autres, encore, cherchent à se réorienter. Tous sont rassemblés autour de deux formatrices, six jours durant, avec un battement de quelques jours histoire de digérer la matière accumulée. Nadine Liétar, formatrice en ErE (Education relative à l’Environnement), se souvient : « Lorsque cette formation a été conçue, il y a cinq ans, la plupart des participants étaient des acteurs de l’environnement. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Ce qui prouve que le développement durable, qu’il questionne ou non, est un thème qui est maintenant présent dans le langage de beaucoup de secteurs. »
L’accent est mis sur la méthode active tout au long de la formation. Les participants s’approprient les animations, non en tant qu’animateurs, mais bien en tant qu’ « animés ». D’une animation à l’autre, ils jouent le jeu. Ils replacent des événements et cartes d’identité d’acteurs sur une gigantesque ligne du temps du développement durable. Ils partent à la découverte du quartier pour y évaluer ses qualités environnementales, socio-culturelles et économiques à travers les yeux d’une petite fille, d’un vieillard ou d’un immigré espagnol. Ils se substituent en jouet en bois et en poupée Barbie, ou en panier et en sac en plastique, puis entament un dialogue sur leurs vies mutuelles.
Baigner dans l’animation pour s’en imprégner et mieux la reproduire par la suite, tel est le principe. Comme le souligne Nadine, « la pédagogie active permet au participant de poursuivre la réflexion. En tant que formatrice, j’ai envie qu’il y ait des répercussions au service d’un changement de société. Pour ce faire, il faut être en position d’acteur. » Après avoir vécu pleinement une animation, les participants, appuyés par les deux formatrices, mettent en exergue ses objectifs pédagogiques. Un débriefing pédagogique au cours duquel les échanges agissent comme autant de nouvelles pistes à exploiter.
Concrètement… Focus animation « Mes choix d’aménagement »
« Vous entrez dans un appartement, où il n’y a rien sauf des conduites de gaz, d’électricité (mais pas d’ampoules) et d’eau froide. Placez les biens qui figurent sur cette liste par ordre prioritaire. » Une feuille à la main, sur laquelle figurent 30 biens matériels allant du lit au téléphone en passant par l’armoire, la poubelle ou encore la moto, les participants s’exécutent individuellement. Après une bonne dizaine de minutes, l’énoncé de la prochaine étape retentit: « Vous entrez dans le même appartement, mais à cinq. Arrangez-vous, ensemble, pour fixer cinq biens prioritaires. » Les groupes une fois formés, les discussions s’amorcent sur les priorités de chacun et la méthode à adopter pour répondre à la consigne…
L’objectif de cette animation n’est autre que d’identifier ses choix et ses valeurs personnelles et de les confronter à ceux des autres pour faire le constat de différences. Une mise en commun permet ensuite d’établir des ponts avec le développement durable et de faire prendre conscience au groupe qu’il existe une multitude de définitions et d’approches liées à ce concept. L’occasion aussi de rappeler que sa mise en place nécessite un recours à la négociation. Un bel exemple d’approche systémique (comprendre la réalité dans sa complexité), agrémentée d’« autosocioconstructivisme » (la construction d’un savoir bien que personnelle s’effectue dans un cadre social).
Un concept aux multiples facettes…
Au fil de la formation, le constat apparaît évident: le développement durable fait depuis peu l’objet de toutes les attentions, au travers des médias, d’ouvrages, de débats publics ou de discours ambiants, et court le risque d’être galvaudé. C’est pourquoi, les animations, contrastées, agissent comme autant d’invitations à mieux cerner le concept de développement durable, sans pour autant le figer dans l’une ou l’autre définition.
L’exploration globale des trois grands piliers du développement durable (environnemental, socio-culturel, économique) passe par d’autres ingrédients incontournables. Le système participatif et les relations Nord/Sud, par exemple. Un détour du côté des critiques et alternatives est également de mise. Le débat est ouvert sur la récupération à tout vent du terme de « développement durable » ou encore sur sa place dans une société régie par la croissance économique. « Chaque participant choisit ce qui lui correspond le mieux et prend ce qu’il a envie de prendre », explique Vanessa Rasquinet, formatrice du CRIE. « Notre pédagogie est axée sur l’esprit critique et les choix personnels, rajoute quant à elle Nadine. Ce qui ne veut pas dire qu’on n’induit pas des valeurs. »
… à exploiter dans toute sa complexité
Un développement durable multiple, donc, qui se marie sans aucun doute avec l’approche systémique adoptée tout au long de la formation. Convaincue par l’intérêt de cette approche, qui vise à comprendre la réalité dans sa complexité, Nadine explique : « L’approche systémique est essentielle, elle peut être appliquée partout. Elle permet de se rendre compte que chacun est acteur de son système et que choisir de modifier un paramètre a des conséquences sur d’autres paramètres. Elle peut être adaptée à tous les publics, même avec les plus jeunes. Un enfant est capable de voir ou de comprendre que des liens existent. Le tout est de décomplexifier… Prendre conscience d’un ou deux liens est déjà une approche de la complexité. »
Les deux formatrices mettent aussi un point d’honneur à faire appel à la pédagogie du « cerveau global ». Celle-ci invite à utiliser les quatre cadrans du cerveau. L’intuition (imaginer) et la sensibilité (ressentir) côtoient le savoir (s’informer) et l’action pratique (manipuler). « Dans l’enseignement, le savoir est toujours mis en valeur, souligne Vanessa. Il faut pourtant être conscient que des enfants et des jeunes ont besoin d’autres portes pour entrer dans l’apprentissage. La pédagogie du cerveau global, ce n’est pas que du « récréatif ». C’est réellement un mécanisme d’apprentissage qui donne de très bons résultats. » Avis que partage Nadine: « J’ai l’impression que les cadrans de l’imaginaire et du ressenti ne font souvent l’objet que d’une activité d’amorce. Pourtant, il n’est pas toujours nécessaire d’y rajouter de l’information, du savoir. Ce type d’activité peut apporter autant de connaissances que des activité qui s’appuieraient sur le savoir ou l’action pratique. »
Techniques et personnes ressources
Photo-langage, jeu de rôle, dessin, écriture, exposé… La formation balaye une kyrielle de techniques pédagogiques. Un forum d’outils figure également au programme. Les deux formatrices ne manquent pas non plus de faire appel à des intervenants extérieurs, issus de secteurs divers et spécialisés dans telle ou telle question. Choix porteur d’un message pédagogique, comme l’explique Vanessa: « On tente surtout de montrer que faire appel à des personnes ressources est une technique pédagogique à part entière. Un autre objectif est bien sûr de faire connaître différentes structures, différents projets. »
Ainsi, le développement durable dans son approche développement et relations Nord/Sud est abordé par l’ONG ITECO, la complexité économique par le Groupe One, la décroissance par un membre du collectif A Contre Courant et les conditions favorisant la modification de comportements par un psychologue-formateur. Une visite sur le terrain transporte également les participants au cœur des réalités d’une entreprise d’économie sociale du Groupe Terre. Ensemble, ils déambulent entre les machines grondantes de récupération de vêtements et de papiers, tout en échangeant quelques mots avec les ouvriers. De retour de leur visite, ils jettent leurs ressentis sur papier, via le dessin ou le conte.
La formation touche à sa fin. Arrive l’heure de la mise en application des acquis. Par groupe, les participants construisent avec enthousiasme une animation, tout en tenant compte des idées pédagogiques saisies en court de route. Derniers échanges, derniers conseils.
C’est avec une épaisse valise d’idées pédagogiques, un esprit critique étayé et un entrain chargé à bloc que chacun regagne son quotidien. Il s’agira ensuite de digérer tout ça, faire le tri et appliquer… pour colporter le message et, espérons-le, susciter l’action. Quant à la formation, elle poursuit elle aussi son chemin en s’adaptant sans cesse aux nouvelles réalités qui gravitent autour du développement durable.
Céline Teret
Article publié dans Symbioses (n°73), le magazine d’Education relative à l’Environnement du Réseau IDée
- Concernant la formation: CRIE de Liège, 3 rue Fusch à 4000 Liège – 04/250 75 00 – www.education-environnement.be/crie
- Parmi les différents intervenants: ITECO, Groupe One, A Contre Courant, Groupe Terre
Pour plus de renseignements concernant cette formation (et d’autres), le mieux est de s’adresser directement au CRIE de Liège, 3 rue Fusch à 4000 Liège – 04/250 75 00 – http://www.education-environnement.be/crie
Bonjour,
Quand refaites-vous un atelier « réflexionx pédagogiques pour un développement durable « ? Rien que le début de l’atelier expliqué dans la colonne orange me passionne!
j’attends votre réponse impatiemment!
Patricia
bravo je n’ai pas tout regardé (manque de temps ce matin) mais j’ai installé le lien dans mes favoris car c’est passionnant et dans les jours à venir je pourrai vous rendre à nouveau visite