Le changement climatique fait parler de lui. A la TV ou la radio, dans les journaux ou magazines, il ne se passe pas un jour sans qu’il ne soit question de hausse des températures, fonte des glaces, économies d’énergie…. Quelles sont les raisons de cet engouement de la part des médias ? Quel en serait l’impact sur le public ? Explications.
1er février, 19h38, RTBF. Le présentateur présente l’info du jour : « ce soir, vous êtes invités à éteindre lumières et veilles pendant 5 minutes, afin de lutter contre le réchauffement climatique ». A 19h55, un journaliste intervient en direct du centre nerveux d’Elia, le gestionnaire du réseau de transport d’électricté pour évaluer en « live » l’effet de la mobilisation citoyenne. Deux jours plus tôt, la Libre Belgique sortait un dossier de 20 pages sur le réchauffement de la Planète, le tout enrichi de quelques conseils aux ménages pour économiser l’énergie et alimenté (au propre comme au figuré) de pub pour une assurance auto ! Idem dans la plupart des médias belges et français. Les exemples font foison : ces derniers mois, le changement climatique ne cesse de faire parler de lui. Pourtant, le phénomène n’est pas récent, les spécialistes s’en inquiètent depuis des années. Les chiffres étaient déjà connus et vérifiés, mais ils se précisent et s’aggravent. Les médias abordaient peut-être déjà le sujet, mais à moindre échelle qu’aujourd’hui. Pourquoi ce soudain réveil ? D’une part, parce que de nombreux événements permettent aux médias d’en parler et d’autre part, parce qu’il émerge de cette problématique un véritable « phénomène de société ».
Des événements sur lesquels s’appuyer
C’est le fonctionnement classique des médias : ne pas parler dans le vide, mais lorsqu’il y a un événement auquel raccrocher l’information. Marc Lits, chercheur à l’observatoire du récit médiatique de l’UCL, le souligne : « Ces moments permettent de cristalliser une attention forte » d’autant plus que, poursuit-il « l’événement s’appuie sur un débat de fond déjà présent ».
La succession d’événements en rapport avec le changement climatique fait qu’on ne cesse d’en parler : les records de températures ; les différents rapports officiels (celui de Stern*, puis le quatrième du GIEC), la pression croissante des ONG ; les publicités « toujours plus vertes » ; le documentaire d’Al Gore « Une vérité qui dérange », sorti en fanfare le 11 octobre 2006 en Belgique…
Mais y a-t-il une volonté de sensibilisation de la part des médias, un réel engagement sociétal ? Les avis sont partagés. Selon Jean-Jacques Jespers, ancien journaliste et professeur en journalisme à l’ULB, « ce n’est pas le rôle des médias d’information de faire du journalisme proactif. Ils ne peuvent que donner des éléments qui permettent de juger. » Néanmoins, certains journalistes tentent de consolider la place de l’information relative à l’environnement au sein de leur média. C’est notamment le cas de Michel Hellas, spécialisé dans l’actualité liée à l’environnement pour la RTBF. Mais il éprouve toujours des difficultés à présenter certains sujets. « Il ne s’agit pas vraiment d’actualité, explique-t-il, c’est intemporel. Il faut toujours un événement important pour pouvoir en parler. »
Les médias en parlent, c’est un fait, allant parfois au-delà des faits en développant des rubriques spéciales, des dossiers d’éclairage. Selon Marc Lits, « c’est à la fois une question d’audience et un choix d’engagement citoyen. Les deux sont compatibles, donc la décision des médias est vite faite. Il y a peu de risques aujourd’hui de heurter beaucoup de monde en prenant une position de défense de la cause environnementale »
Un phénomène de société
La préoccupation sociale concernant les changements climatiques est importante. De nombreux indicateurs prouvent que les choses sont en train de bouger, les gens commencent à se sentir concernés. De plus, des applications concrètes se répercutent dans la vie quotidienne. La suppression progressive des sacs en plastique dans les supermarchés par exemple ou l’utilisation, certes abusive, de l’écologie comme argument de vente. « Le problème environnemental au sens large est plus présent qu’il y a dix ans, poursuit Marc Lits. C’est une tendance lourde et manifestement, ça va le rester. Il suffit de voir, en France, la façon dont la candidature de Nicolas Hulot a mobilisé les politiques autour du pacte écologique. Il faut croire qu’ils ont tous compris que c’est un enjeu, en tout cas médiatique, important, sinon ils n’auraient pas tous couru derrière lui pour le soutenir. »
Le discours tenu dans les campagnes de protection de la planète prône des valeurs plutôt positives. Comme le dit Marc Lits, « il ne s’agit pas d’un discours catastrophiste qui risque d’affoler mais plutôt d’un discours volontariste. » Reste à passser de la prise de conscience au véritable changement de comportements. Là encore, les médias auront un rôle à jouer, sur le long terme.
Stéphanie Moyaert et Christophe Dubois
- Les extraits de You Tube consacrés au réchauffement climatique
- le spot de lancement de l’action « 5 minutes pour la planète » du 1er février 2007
« La solution commence ICI »: cet article met en avant la thématique des changements climatiques et s’inscrit dans le cadre de la Coalition Climat, dont le Réseau IDée (coordinateur de Mondequibouge.be) est membre.