Approchez, approchez, bon poisson ici !Clés pour comprendreGestes pratiques

19 décembre 2007

image de poissonAvec 10 kg par personne et par an, le belge est ce que l’on peut appeler un petit mangeur de poisson, loin derrière le japonais qui en consomme 70 kg ! Il aime surtout le cabillaud, la dorade, la plie ou la raie. Mais attention… les fêtes arrivent et là c’est une autre histoire ! Car durant cette période nous allons nous plaire à consommer saumons, langoustes, crevettes, thons, homards, huîtres, coquilles Saint-Jacques etc.

Où est le problème ? Du poisson, des fruits de mer, il y en a plein les étals ! On y trouve de tout et toute l’année… C’est peut être justement ça le problème.

En effet, les poissons les plus populaires de nos assiettes sont souvent issus de pêcheries destructrices des écosystèmes ou illégales. Selon la FAO (Food and Agriculture Organisation des Nations Unies), 75% des stocks sont exploités au maximum ou surexploités. Le décor est planté, il convient malheureusement mieux de parler de surpêche que de pêche…

A la pêche aux infos !

Légalement le consommateur doit pouvoir trouver sur l’étiquette : le nom commercial de l’espèce, la zone où le poisson été capturé ou son pays d’élevage ainsi que la méthode de production (mention « pêché en mer », « pêché en eau douce », ou « issu d’élevage »). Or, ces informations obligatoires n’aident pas vraiment les consommateurs à juger si les produits de la mer sont issus d’un mode d’exploitation durable.

Les mentions concernant les méthodes de pêche utilisées sont floues et c’est là qu’on aimerait avoir plus de renseignements. Par exemple, le bar peut être « de chalut » (graves dommages pour l’écosystème) ou « de ligne » avec des impacts minimisés. De plus, une même espèce peut être commercialisée sous plusieurs appellations et inversement. Les résultats de l’étude menée en Belgique par Test-Achats en 2006 indiquent que plus de 90% des produits contrôlés donnaient une information incomplète via l’étiquette, voire aucune information.

Pas facile dans ces conditions de choisir le poisson le plus respectueux de l’environnement ! Alors n’hésitons pas à questionner notre poissonnier !
Il n’y a donc pas de recette miracle pour les fêtes. Certains conseils, valables toute l’année, peuvent toutefois nous aider à réduire notre impact sur le milieu marin.

Retrouvons le goût de l’exception !

Il est possible de réduire sa consommation de poisson et, en contrepartie, de le choisir de qualité. Qui a vu le film « Le cauchemar de Darwin » ne mange plus de perche du Nil. Pourtant ce poisson est toujours en tête des ventes avec des prix défiant toute concurrence. Pas étonnant quand on sait comment il est produit. Mieux vaut alors savourer de temps en temps un « bon » poisson, un peu plus cher mais produit durablement.

De plus, financièrement on a tout à y gagner. Le prix des poissons les plus demandés s’envole et vu la conjoncture, il va probablement continuer à augmenter.
Combinons cette réduction à une alimentation équilibrée et variée. Les poissons gras (thon, hareng, anchois, maquereau…) sont une source privilégiée d’acides gras essentiels (oméga 3). Cependant, ces mêmes poissons sont aussi ceux qui accumulent dans leurs graisses certains polluants comme le mercure. Afin d’équilibrer votre alimentation en oméga 3 vous pouvez varier les huiles végétales : noix, raisin, soja, lin, maïs aussi sésame, arachide, tournesol… Une cuillère d’huile de colza contient la même quantité d’Omega 3 que 70 g de saumon (1g).

Pêche ou aquaculture : cherchons les labels

A coté de la surpêche, le problème est aussi la pêche secondaire (poissons non désirés et qui sont rejetés blessés ou morts). Celle-ci prend parfois des proportions gigantesques (pour attraper 1kg de crevettes on estime une perte de 8 à 12 kg de poissons, mais il peut aussi s’agir de tortues ou de dauphins).

Cette situation a conduit à la création du label Marine Stewardship Council (MSC) qui garantit que la quantité pêchée n’excède pas la capacité des populations à se régénérer et que les impacts sur l’écosystème (y compris les espèces non ciblées par la pêche) sont minimisés. Acheter des produits issus d’une pêche durable soutient une gestion durable de la pêche.

Qu’en est-il des produits issus de l’élevage ?

Le principal problème de cette méthode, qui est présentée comme l’alternative à l’épuisement des stocks sauvages, est la pollution du milieu par les déchets alimentaires et chimiques issus de l’activité d’aquaculture. En effet, des résidus de nourriture vont former un dépôt excessif sur le fond, ce qui va aboutir à des zones « asphyxiées » (sans oxygène mais avec nitrates et phosphates). Ces zones vont d’ailleurs favoriser le développement de germes pathogènes. Pour lutter contre cela (et parfois même de manière préventive), l’aquaculture va utiliser des antibiotiques.

L’aquaculture biologique (bon renouvellement de l’eau, densité contrôlée, rations alimentaires adaptées, pas ou peu d’antibiotiques), est alors la meilleure alternative.

Choisissons les bonnes espèces et respectons les saisons

Vu la situation actuelle, il est primordial de sélectionner les espèces que nous consommons et d’être attentif à l’origine des produits de la mer. Il existe des guides (A vous de voir si vous voulez mettre là les liens qui sont en bas de page) reprenant la liste des espèces à proscrire car menacées d’extinction et celles à préférer.

Le saumon par exemple va être abondamment consommé pendant les fêtes : fumé, tranché, farci, en darnes, en sushi… Autrefois mets de fête par excellence, il est devenu un produit banal. On le retrouve à toutes les périodes de l’année au mépris des saisons de reproduction. Conséquence : le saumon sauvage de l’Atlantique Nord est aujourd’hui menacé.

Le cabillaud aussi est victime de son succès auprès des consommateurs. Même s’il est disponible dans les rayons frais ou surgelés toute l’année, le cabillaud doit idéalement se déguster de janvier à avril. N’en achetons pas en dehors de cette période afin de ne pas encourager la pêche illégale (qui rapporte aux trafiquants entre 3 et 8 milliards d’euros par an selon Greenpeace).

Mais attention les guides ne renseignent pas tous les produits. Par exemple, vous ne trouverez pas le surimi dans la liste. Le surimi est un haché de poisson additionné d’agents «de texture et de saveur»… Mmmmh ! Il est principalement réalisé à partir de poissons gravement surpêchés comme le cabillaud, le lieu et le saumon. A éviter donc !
Il y a évidemment un danger à reporter toute la pression actuelle sur d’autres espèces. C’est pourquoi il est aussi nécessaire de consommer les produits de la mer différemment.

Faisons attention à la taille, c’est le minimum !

La situation de surpêche conduit à la prise de poissons de taille de plus en plus réduite, souvent en dépit de la réglementation en vigueur. Or, la protection des juvéniles est indispensable pour une gestion durable des pêcheries. Refusons les poissons manifestement trop petits qui ne pourront pas contribuer au renouvellement du stock (11 cm pour la sardine, 24 cm pour la sole …).

Privilégions les poissons pêchés en Europe

Transporter les poissons réfrigérés ou congelés vers le lieu de consommation finale est un gaspillage d’énergie. Du point de vue de l’efficience énergétique, il est préférable de consommer du poisson issu de la production locale ou du littoral le plus proche. Pourtant un pourcentage important des poissons consommés au Nord parcourent des milliers de kilomètres car ont été pêchés dans les mers du Sud.

Par ailleurs, surconsommer les poissons du Sud a des conséquences sociales importantes. Il est par exemple presque plus facile de trouver du « tiof » (poisson de la famille du mérou), ingrédient principal du plat national sénégalais, dans le quartier « Matonge » de Bruxelles que sur les marchés locaux où les prix ont flambé ces dernières années. Les pêcheurs locaux ne peuvent tout simplement pas faire concurrence aux bateaux de pêche performants venant d’Europe qui écument les mers pour l’exportation.

Le filet est entre nos mains !

En orientant nos achats vers des produits respectueux de l’environnement, nous pouvons favoriser des modes de gestion plus durables des pêcheries. Alors pour les fêtes, choisissons bien nos poissons et crustacés !
Que les fêtes soient belles pour nous, nos familles et amis, mais aussi pour nos papilles ainsi que pour la planète !

Article rédigé par Lise Frendo, , dans « L’art d’éco… consommer ! », la newsletter du Réseau Eco-consommation (n°32, décembre 2007)

Photo: www.greenpeace.org

Pour en savoir plus :

Un commentaire sur “Approchez, approchez, bon poisson ici !”

  1. alain le sann dit :

    deux remarques
    -où avez vous trouvez vos bêtises sur le surimi?
    -êtes-vous certains que le boycott de la perche du Nil soit une bonne chose? le débat est loin d’être clos
    Plus globalement, si le consommer local est en soi une bonne chose, pour la pêche c’est bien plus compliqué, l’histoire est faite d’échanges complexes sur plusieurs siécles, cf hareng, morue, sardine etc.
    SVP sortez des simplismes.