Rencontre avec un monsieur aux yeux pétillants et au sourire rassurant, qui se dit « ni riche, ni pauvre », mais bien concerné pas l’environnement et la santé. Aux côtés d’autres familles, Mustapha, sa femme et ses enfants participent à un projet de logements « passifs », dont l’originalité se situe au croisement entre politique d’immigration, processus participatif et environnement.
« Il y a quelques années, quand je suis tombé au chômage, j’étais perdu. Depuis, j’ai appris énormément… » Mustapha Mechbal a atterri à Bonnevie, maison de quartier molenbeekoise, il y a sept ans d’ici, alors qu’il cherchait un autre logement social pour abriter sa famille. A l’époque, il vivait dans un vétuste appartement deux chambres avec sa femme et ses quatre enfants. Suite à des problèmes de santé, ce pâtissier d’origine marocaine, en Belgique depuis trois décennies, se voit contraint d’arrêter de travailler. « Je cherchais un logement décent, mais tout était trop cher. C’est à Bonnevie que j’ai découvert le collectif ALARM. » Si au départ ce collectif « Action pour le Logement Accessible aux Réfugiés à Molenbeek » regroupait essentiellement des demandeurs d’asile, il s’est progressivement ouvert aux familles précarisées d’origine immigrée. Comme la famille Mechbal.
Immigration, participation, eco-construction
Depuis trois ans, un projet de logements « passifs » se dessine à petits pas à Molenbeek. Son originalité se situe au croisement entre politique d’immigration, processus participatif et environnement. Ce projet est mis en œuvre et porté conjointement par la maison de quartier Bonnevie et le Fonds du logement, en collaboration avec le Ciré (Coordination et initiatives pour et avec les réfugiés et les étrangers). Il devrait offrir la possibilité à des familles réfugiées ou régularisées, provenant de divers horizons (Congo, Guinée, Liban, Maroc, Rwanda, Somalie) et disposant de peu de revenus, de devenir propriétaires de l’un des 14 appartements d’un immeuble passif. Une éco-construction qui permettra aux futurs propriétaires de réduire jusqu’à 90% leurs charges énergétiques. Grâce à plusieurs aides publiques (primes, subsides…), ces logements devraient sortir de terre d’ici 2010. Et même si, d’ici là, le Fonds du logement reste l’unique maître d’œuvre et propriétaire, les futurs acquéreurs participent activement aux différentes étapes de la mise en place du projet : constitution d’un fonds de réserve (chaque famille verse 50 euros par mois sur un compte commun), échanges avec les architectes et entrepreneurs, négociations avec les pouvoirs subsidiants… Un processus participatif foisonnant chapeauté par une association créée à cet effet et qui porte bien son nom : L’Espoir.
« Un logement décent, c’est essentiel pour la santé et ça permet aux parents de mieux éduquer leurs enfants, tient à souligner le père de famille. En me mobilisant pour le droit au logement, j’ai appris beaucoup. On a manifesté, placardé des affiches dans des logements inhabités, mis en avant nos revendications. On a même monté une pièce de théâtre. » Une participation active qui, avec les années, a progressivement évolué vers la participation à un projet social d’envergure : la construction de 14 appartements « passifs » (très faible consommation d’énergie) pour les familles immigrées à petits revenus (lire encadré ci-contre).
De la mobilisation à la sensibilisation
Mustapha Mechbal est d’ailleurs devenu président de l’association de fait « L’Espoir » qui rassemble et représente les futurs propriétaires de ces éco-habitations. C’est dans ce cadre qu’il a suivi une formation « énergie », afin d’ensuite colporter le message auprès des autres familles. « On donne des trucs pour ne pas gaspiller l’énergie et donc faire des économies. Le but est de préparer les futurs propriétaires et leurs enfants. Souvent, les gens ont de fausses idées en tête. Il faut changer les habitudes. » Un sourire vient animer la moustache du petit homme : « Ca me fait du bien d’expliquer tout ça et d’aider les familles à faire des économies. J’essaie aussi de donner l’exemple. D’ailleurs, avec ma femme et mes enfants, on fait tout pour économiser sur l’eau, l’électricité… On participe aussi au Jardin Urbain. » Et à ceux qui diront que l’environnement, c’est pour les riches, il rétorque : « L’environnement, ça demande juste un peu de conscience et un peu de temps. Mais ça ne coûte rien ! Tout le monde sait faire des gestes pour la planète ! »
Au-delà de son engagement pour l’accès au logement et pour l’environnement, ce monsieur au grand cœur s’investit également dans la Maison médicale de son quartier et est actif au sein de l’Université populaire d’ATD Quart-Monde. « J’ai envie de donner du temps aux autres et de me sentir utile. On m’aide donc moi aussi j’ai envie d’aider. »
Céline Teret
Article publié dans Symbioses (dossier « Précarité : une question d’environnement ? » – n°80), le magazine d’Education relative à l’Environnement du Réseau IDée
- Maison de quartier Bonnevie – 02 410 76 31 – http://bonnevie.vgc.be
- Le blog L’Espoir
- Autre article intéressant au sujet du projet L’Espoir : « Immigrés pauvres éco-batisseurs » disponible sur www.alterechos.be
- Lire aussi le dossier « Précarité : une question d’environnement ? » de Symbioses (n°80 – automne 2008), le magazine d’Education relative à l’Environnement du Réseau IDée
moi aussi je suis tres fier de mon pere et j espere que beaucoup de gens suiveront cet exemple
Je suis très très fière de mon père.
Mechbal Laila