In the rich men’s world (2)… Choqué par les propos qu’il relève dans la bouche de plusieurs écologistes au sortir du Sommet de Copenhague sur le climat, Hervé Kempf s’indigne dans son dernier ouvrage. Il entend dire que la démocratie se verrait être un régime inefficace pour faire face à l’enjeu de la crise écologique, au vu de son ampleur mais aussi de l’urgence dans laquelle elle nous inscrit. « La faillite de la démocratie » affirmée par Nicolas Hulot n’est pour Hervé Kempf qu’une mauvaise compréhension du système politique, dangereuse car facilitant un glissement vers la « tentation autoritaire ».
Non, d’après l’essayiste, nous ne vivons plus dans un système démocratique, mais dans une oligarchie, un système dans lequel « quelques uns délibèrent entre eux des solutions qu’ils vont imposer à tous ». Citant quelques personnalités des mondes politique, économique et médiatique, Hervé Kempf démontre qu’en circulant d’une sphère à l’autre, ces puissants travaillent aux intérêts d’une même minorité de riches. Ce rapport décomplexé entre la politique et l’argent donne lieu à un mode de gouvernement déconnecté de la volonté du peuple. Pour preuve, le cas du dernier traité européen : quand le peuple dit « non », l’oligarchie dit « si ! ».
Apprendre à se relever
De nombreuses alternatives au modèle dominant existent, loin de cette « réalité orchestrée ». Vincent Boutry de l’Université Populaire et Citoyenne de Roubaix, a par exemple présenté le travail mené par le Collectif de l’Union, un collectif d’associations et d’habitants vivant aux alentours d’une énorme friche en cours d’aménagement. Ces militants cherchent à faire pression sur les décideurs pour les amener vers leur réalité à eux : économie locale, habitat partagé, mémoire ouvrière, justice sociale…
Si Hervé Kempf soutient toute initiative en faveur de « moins de croissance, plus de biens communs, des services publics de qualité (éducation, santé, culture…) », ces expériences restent pour lui insuffisantes… Les riches, détiennent entre leurs mains l’avenir de la planète.
Nous sortons de la conférence avec cette question: « Que faire alors de ces riches ? ». Pour le Mouvement des Villes en Transition, riche ou pauvre, le dérèglement climatique, la fin du pétrole bon marché, vont engendrer une situation telle que nous devrons coopérer, si nous ne voulons pas nous entretuer. Les Indignés, quant à eux, ont remis à l’ordre du jour, la nécessité de revenir à une démocratie réelle. Dès maintenant, les enjeux sont à prendre à bras le corps : apprendre à coopérer, à débattre et décider collectivement. Apprendre aussi à se limiter pour mieux appréhender les perturbations écologiques à venir, proches ! Quant aux riches, rappelons-nous qu’« ils sont grands que parce que nous sommes à genoux » (3) …
Héléna Salseul, Université Populaire et Citoyenne de Roubaix
Article publié dans Le 23, le journal d’expression des associations du réseau MRES – Maison Régionale et de l’Environnement des Solidarités (n°205, automne 2011)
(1) Maison Régionale de l’Environnement et des Solidarités (MRES), Centre Ressource du Développement Durable (CERDD), Université Populaire et Citoyenne de Roubaix (UPC)
(2) Dans le monde des riches (cf. ABBA « Money, money, money »)
(3) La Boétie, Discours de la servitude volontaire
- Hervé Kempf, « L’oligarchie ça suffit, vive la démocratie », Ed. Seuil, janvier 2011
- Rob Hopkins, « Manuel de Transition », Ed. Ecosociété, septembre 2010
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