Susciter la participation citoyenne des jeunes et leur donner des outils pour mettre en œuvre leurs projets : tel était l’objectif de la première édition de BruXitizen, une initiative belge qui a trouvé son inspiration au Québec.
Au milieu de jeunes bruxellois disposés en cercle, deux intervenants participent à la discussion matinale portant sur les révolutions récentes en Tunisie et au Québec. « On va mener ce débat de façon collaborative », explique Thomas Lemaigre, l’un des coordinateurs de l’événement. Aux côtés des deux invités, une chaise vide est installée pour les jeunes qui souhaitent poser leurs questions. « Lorsque la discussion s’essouffle, vous vous levez et la personne assise vous cédera sa place. » Et le dispositif fonctionne… La chaise musicale s’emballe sur le rythme des questions et des échanges dans la salle !
Présente à BruXitizen : une classe de l’Institut de l’Assomption de Boitsfort
« Nous avons participé à la manifestation du 14 novembre contre l’austérité, explique Charlotte Caroux, élève de sixième secondaire. Dans le cadre de notre école, notre absence était injustifiée, alors nous avons écrit une lettre au directeur pour expliquer les raisons de notre absence. La lettre a circulé en Tunisie, au Maroc, en Chine et au Bénin et on s’est rendu compte qu’une action ici pouvait être relayée ailleurs. A présent, nous voulons choisir un axe d’action à mettre en œuvre dans notre école, mais aussi rencontrer des jeunes qui pensent comme nous, et des associations qui ont développé des initiatives qui peuvent nous inspirer. C’est ça qu’on est venu chercher à BruXitizen. »
Pendant quatre jours en novembre, c’est sur ce mode convivial et ludique qu’un public âgé de 18 à 35 ans a eu l’occasion de débattre d’enjeux actuels et de participer à une quarantaine d’ateliers sur la création d’une asbl, d’un contrat de quartier, d’un potager urbain…
Salon de l’engagement citoyen
« Nous avons rassemblé des jeunes d’horizons différents, étudiants, chercheurs d’emplois, salariés, avec l’idée de dire que l’engagement n’est pas seulement syndical ou politique, mais qu’il se vit aussi dans son quartier ou dans sa ville », explique Aude Garelly de l’Agence Alter, l’asbl organisatrice de l’événement.
BruXitizen s’inspire d’une initiative québécoise dont l’objectif est d’encourager la participation citoyenne. Michel Venne, fondateur de l’Institut du Nouveau Monde, était présent lors de la rencontre. D’après lui, les deux initiatives se rejoignent dans leur volonté de montrer aux jeunes qu’il est possible d’être acteur dans la société, même dans un contexte de crise économique. « Lors de la discussion, je trouvais important de montrer que des jeunes qui s’organisent, peuvent avoir un impact majeur sur leur pays, explique-t-il. Cette influence, ils la développent à condition qu’ils dialoguent entre eux, sans rompre le lien inter-générationnel, en appuyant leurs revendications sur une connaissance des enjeux. »
Pour la petite histoire…
À Montréal, l’Institut du Nouveau Monde reçoit environ 500 jeunes chaque année dans son École d’été. Parmi eux, une petite délégation belge. «Entre 2005 et 2007, les deux coordinateurs de BruXitizen ont participé à notre école, explique Michel Venne. Ils ont eu envie de faire la même chose en Belgique et nous avons partagé nos approches. » Quelques années plus tard, BruXitizen a tenu sa première édition, avec quelques adaptations contextuelles. « Les mouvements de jeunesse sont davantage structurés et institutionnalisés au Québec. On peut donc s’appuyer facilement sur ces réseaux pour mobiliser les jeunes. En Belgique, cette institutionnalisation est moins marquée. »
Plusieurs tables rondes ont notamment permis aux jeunes d’exprimer leurs craintes et leurs espoirs. « J’ai peur du chômage, j’ai peur de ne pas trouver de travail, voilà mon cauchemar », déclare une jeune fille lors de la discussion sur la mesure du bonheur. L’instant d’après, une participante témoigne de son optimisme quant aux initiatives mises en place dans sa commune, et disposant d’un Agenda 21. « Nous ne faisons pas abstraction de la crise, explique Aude Garelly. Nous amenons les jeunes à réfléchir pour qu’ils trouvent leur voie dans ce contexte. »
L’événement prévoyait également l’organisation d’ateliers. Plusieurs associations partenaires ont été conviées pour animer une quarantaine d’entre eux. Parmi elles, Bruxelles Formation et Actiris, mais aussi des partenaires associatifs, comme Iles asbl qui accompagne des artistes, le projet Jobyourself qui propose un processus d’accompagnement de création d’entreprises, Rencontre des continents, la Foire aux savoir-faire, Recyclart, le Début des haricots, les Ateliers débrouille, etc. Bref, une série d’invités pour prendre conscience de l’existence d’une série d’outils rendant possible la mise en place d’un projet citoyen. « Et montrer qu’il existe d’autres options que le salariat « , souligne Aude Garelly.
Et quid de la suite à donner à BruXitizen ? « L’étape suivante, ce serait que BruXitizen devienne un maillon dans la chaîne des autres initiatives qui font une place aux jeunes, et qui existent par ailleurs à Bruxelles », termine la coordinatrice. Au total, environ deux cents personnes ont participé au festival.
Delphine Denoiseux