Une protection sociale pour tous!Clés pour comprendre

12 octobre 2015

Notre système de protection sociale fait figure de modèle dans le monde. Et pourtant, plus d’1,5 million de personnes vivent dans la pauvreté dans notre pays et ne jouissent pas d’une protection sociale suffisante. Pour les trois quarts de la population mondiale, le moindre déboire s’apparente à un problème vital, que ce soit tomber malade et ne pas pouvoir payer son traitement ; être licencié et ne pas avoir de revenus ; travailler toute une vie et ne pas pouvoir bénéficier d’une retraite ; travailler à temps plein tout en vivant dans la pauvreté. C’est la réalité de plus de cinq milliards de personnes alors que la protection sociale est un mécanisme accessible même pour les pays les plus pauvres.

Les pays offrant une bonne protection sociale à leurs citoyens résistent mieux à la crise et répartissent plus équitablement les richesses. La Belgique est l’un des pays européens où la crise de 2008 a eu le moins d’impact sur la vie quotidienne de ses habitants. Notre protection sociale a permis à de grands groupes de personnes de ne pas sombrer dans la pauvreté et s’est même avérée bénéfique pour la santé de notre économie. Les pays du Sud ayant instauré certaines formes de protection sociale enregistrent eux des inégalités moins flagrantes entre les personnes. Grâce à la Bolsa Familia (1), le Brésil est, par exemple, parvenu à empêcher des milliers de familles de s’enfoncer dans l’extrême pauvreté.

Protection sociale pour tous !

Tel est l’appel lancé par la campagne menée nationalement et conjointement par Solidarité Mondiale, les Mutualités chrétiennes et la CSC avec les autres syndicats, mutualités et d’autres ONG sous la houlette du CNCD-11.11.11 et Elf, elf, elf pendant deux années. Avec une campagne publique et un vaste agenda de lobbying comprenant quatre revendications politiques.

Les 4 revendications adressées aux décideurs politiques belges :

1. La protection sociale constitue un droit de l’homme : chaque pays doit l’ancrer dans son cadre légal.
2. La protection sociale est finançable même pour les pays les plus pauvres.
3. Les organisations sociales doivent participer aux décisions politiques en matière de protection sociale.
4. La Belgique et l’Europe doivent consolider leur propre politique de protection sociale.
Faisons de la protection sociale une réalité pour tous !

Plus d’infos sur: http://protectionsociale.be

Financièrement réalisable… Comment ?

Il n’est absolument pas nécessaire que la situation économique soit florissante pour démarrer un système de protection sociale. Ainsi, chez nous, la sécurité sociale a été instaurée en pleine période de crise après la Seconde Guerre mondiale. Peut-être parce qu’à l’époque, les gens ont pris conscience de ce qui était vraiment important ? En concluant le Pacte social de 1944, les syndicats et les employeurs se sont engagés à améliorer le bien-être de la population belge par le biais de la solidarité.

Des études réalisées par l’Organisation internationale du travail démontrent que la mise en place d’un socle de base de protection sociale pour tous est abordable financièrement dans chaque pays, y compris les pays en développement. Des économistes renommés le confirment d’ailleurs. Pour un pays tel que l’Inde, qui compte plus d’un milliard d’habitants, verser à chaque personne âgée une pension décente ne coûterait que 3% du PNB.

Volonté politique

La protection sociale est un droit reconnu par la Déclaration des droits de l’homme. Un Etat a donc l’obligation de respecter et garantir ces Droits. Poser les bons choix requiert cependant un certain courage : il faut un budget et un financement cohérents, une perception d’impôts basée sur une fiscalité juste et un système de cotisations progressives. Par exemple, le gouvernement sud-africain a réduit de moitié le budget de la défense et le montant ainsi dégagé a été alloué au développement d’une sécurité sociale de base. Un élément important dans le développement de la protection sociale est aussi la reconnaissance de la société civile, à savoir, les syndicats, mutualités, ONG et autres mouvements sociaux, de même que la valorisation de leurs initiatives, qui d’ores et déjà assurent les personnes et leur offrent des services. Cela signifie aussi qu’il faut avoir le courage de résister à la privatisation de la solidarité ; la protection sociale doit exister et être garantie pour tous.

Espoir dans le Sud

Comprendre l’importance de la protection sociale a incité bon nombre d’organisations à prendre elles-mêmes des initiatives sur ce plan. Citons quelques exemples de partenaires de Solidarité Mondiale.
Au Bangladesh, l’organisation de soins de santé GK a développé une assurance maladie, destinée également aux plus démunis.
En République dominicaine, au Burundi, la MUNASA (Mutuelle nationale de santé) chapeaute pour l’heure trente-cinq mutualités. Outre l’assurance maladie, les mutualités renforcent de surcroît l’offre des centres de santé, tout en mettant sur pied des initiatives destinées à aider ces personnes à obtenir des revenus.

En Belgique

Bien souvent, nos concitoyens ne se rendent plus compte de la valeur de notre système de protection sociale, jusqu’au moment où ils tombent malades… Wouter Torfs, grand patron de la marque de chaussures Torfs, nous confiait récemment : « À présent que j’ai dû être admis et soigné à l’hôpital, je ne comprends que trop bien à quel point nous devons apprécier à sa juste valeur notre système de sécurité sociale. Chez nous, une admission dans un hôpital est tout à fait abordable. Dorénavant, je réfléchirai à deux fois avant d’encore formuler des critiques sur nos lourdes charges. »
Pourtant, notre système de protection sociale est mis sous pression. On entend constamment dire qu’il serait trop vaste et trop cher et qu’il faudrait le réduire d’urgence. Comme s’il était possible de réaliser des économies en sabrant la protection sociale des gens ! Personne ne choisit de tomber malade ! Est-ce sa faute à lui si un travailleur contracte une maladie liée à sa profession ? Le droit au crédit-temps s’amenuise : suppression de l’indemnité pour le crédit-temps sans motif… Ces exemples montrent le « détricotage » en cours de notre protection sociale.

(1) La Bolsa Familia : aide financière pour les familles pauvres liée à des vaccinations obligatoires et à l’obligation scolaire.

Article paru dans La Fourmilière/Contrastes n°167 (mars-avril 2015, p.18-19) des Equipes populaires.

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