Un soleil timide en ce samedi après-midi de mai. A l’orée de la Forêt de Soignes, côté Rouge-Cloître, une quarantaine de personnes s’apprêtent à entamer une balade découverte forestière, à l’appel de la Société Royale Forestière de Belgique (SRFB). « Nous vous invitons à mettre tous vos sens en éveil, propose Vincent, l’un des deux guides forestiers volontaires du jour. Dans la forêt, il y a certes les arbres et les animaux. Il y a aussi les plantes, souvent invisibles quand on n’y prête pas attention et pourtant essentielles. »
Première halte, Samir prend le relais pour rappeler les trois grandes fonctionnalités de la forêt. L’écosystème forestier, évidemment, ce lieu de biodiversité et de vie, abritant et nourrissant faune et flore multiples. La forêt comme lieu de loisir et de détente, aussi, puisque chaque année, quelque 2 millions d’usagers foulent les sentiers de la Forêt de Soignes. Une fonction économique, enfin, pas la plus usitée en Forêt de Soignes, mais importante en d’autres lieux (en Wallonie, par exemple, la filière bois fournit de l’emploi à 18 000 personnes). Après avoir passé en revue quelques métiers liés à la forêt, Amir embraille sur la gestion forestière. Il explique la Forêt de Soignes, forêt publique, à cheval sur 3 territoires et gérée par les 3 Régions, bruxelloise, wallonne et flamande. Un vaste espace boisé de 5000 hectares est traversé par une autoroute, un ring et une voie de chemin de fer. L’un des joyaux de cette forêt est sans nul doute ses hêtres, qui représentent environ 75% des essences présentes en ces lieux. La « hêtraie cathédrale » est d’ailleurs reconnue au patrimoine mondial de l’UNESCO depuis peu.
Pourtant, les hêtres souffrent de plus en plus. En cause, les changements climatiques. « Le hêtre a besoin d’humidité, explique Samir. Les récentes périodes de sécheresse sont une source importante de stress pour lui. » Les 3 gestionnaires de la Forêt de Soignes viennent d’ailleurs de plancher sur un nouveau plan de gestion visant, notamment, à diversifier les essences d’arbres et favoriser celles (comme le chêne sessile) plus résistantes aux changements climatiques actuels et à venir. Augmenter la biodiversité en forêt, c’est aussi favoriser l’accueil des êtres vivants qui la côtoient. Ce n’est donc pas anodin si le groupe s’arrête devant un arbre mort. « Encore debout ou au sol, l’arbre mort a une fonction essentielle, poursuit le guide. Il favorise toute une série d’insectes, d’oiseaux… et donc une biodiversité incroyable. Les gestionnaires de la forêt ont d’ailleurs l’obligation de laisser 3 arbres morts à l’hectare. »
Après deux heures de balade, les participants déposent chacun·e à leur tour un mot, un ressenti : interconnexion, mystère, respect, silence, équilibre… Des mots laissés au cœur de la forêt, alors que le groupe se disloque, empruntant des sentiers inexplorés.
D’ici deux semaines, lors de la prochaine balade de la SRFB, Louis Dubois guidera un autre groupe. Ce pensionné passionné est l’un des piliers de l’équipe de guides forestiers volontaires. Sous son bob kaki, il parlerait des arbres et de la forêt des heures durant, précision des chiffres à l’appui. Mû par l’envie de partager ses intarissables connaissances au plus grand nombre, le guide forestier semble connaître les moindres recoins de la forêt, ses secrets les plus enfouis. « Notre but à la SRFB est de permettre aux gens d’entrer en contact avec la nature et de se rendre compte de son importance. » Connaître la forêt pour mieux la respecter.
Céline Teret
Article rédigé dans le cadre du dossier « Apprends-moi l’arbre » (n°123, sortie en août 2019) du magazine SYMBIOSES
(1) Chaque année, la SRFB propose 12 balades en Forêt de Soignes. Infos sur www.srfb.be